samedi, août 12, 2006

L'exploit

Bien que sa préparation à affronter des créatures extraordinaires fut limitée, le Maître de Cavalerie fit front avec beaucoup de sang froid. L’avant-garde du groupe assaillant était constituée des gobelins qui chargeaient promptement. Leur avancée était couverte par les gargouilles qui avant de prendre leur envol avaient chargé deux paniers de pierres arrimées à leurs pattes. Enfin à l’arrière restait le golem, le démon ailé n’était jamais loin de la créature stupide et veillait à conserver une emprise suffisante sur le monstre pour qu’il exécute correctement ses ordres.

Le maître de cavalerie ne craignait pas les gobelins, bien que plutôt nombreux, il aurait vite fait de les piétiner avant qu’ils aient pu les désarçonner. Toutefois, il ne pouvait se jeter dans la bataille sans éliminer la menace des gargouilles. Il opta donc pour une défense en carré. Les hommes avancèrent par ligne de trois très serrées. Ceux de l’avant braquaient leur lance sur les assaillants terrestres. Ensuite les lignes alternaient entre les protecteurs munis de larges boucliers et les archers prêts à tirer.

Son groupe était prêt, la tension de ses hommes était palpable. Il poussa un hurlement pour galvaniser ses troupes et donner le signe du départ. La compagnie chargea au grand galop. L’heure de vérité pour le Maître de Cavalerie était venue. Le contacte se fit quelques secondes plus tard, l’impact balaya les gobelins. Ils furent piétinés par les chevaux, embrochés sur les lances de la première ligne dans un effroyable bruit d’os broyés et de hurlements de douleurs. Surpris par les redoutables chevaux de combat des chevaliers, les gobelins furent mis en déroute et se dispersèrent au premier choc. Un bon quart de leurs effectifs ne se releva pas.

Au même moment, les gargouilles commencèrent le pilonnage des cavaliers. Les pierres que les monstres propulsaient faisaient plusieurs livres. Et leur force peut commune permettait aux gargouilles de les propulser à près de trois mètre. Heureusement que la vitesse du groupe rendait la visée difficile. Beaucoup de projectiles ratèrent leur cible. Cependant, deux blocs atteignirent la compagnie tuant trois hommes et manquant de peu de rompre la formation.

Le Maître de Cavalerie sonna la riposte et les archers munis de grands arcs lancèrent leurs traits sur l’armada ailée sans causer le moindre dégât. La stupeur saisi les archers mais l’autorité de leur chef les détourna de leur échec. Malgré ce fiasco, ils étaient passés, les gargouilles étaient à cours de munitions. Restait toutefois un obstacle de taille : Le golem.

Bien qu’à distance respectable, le golem se mis à changer de couleur et finit par s’embraser. Des flammes jaillissaient de tout son corps et la chaleur était palpable. Il faillait passer coûte que coûte pour s’abriter au sein de Vériadan sinon s’en était fini. Soudain, le golem leva une immense massue qui s’embrasa à son contact, il s’agissait plutôt d’un énorme tronc d’arbre employé comme tel. Le Maître de Cavalerie savait qu’un coup suffirait à briser sa formation et donc entraînerait sa perte. Il fallait faire vite et ne pas perdre de vitesse pour éviter le retour des gargouilles.

Il ordonna donc un déploiement en V pour limiter les pertes potentielles. Sur les extrémités avant du V, se retrouvèrent les archers avec pour ordre de cibler les tendons d’Achille, le centre devait se frayer un chemin en faisant front au monstre. Le déploiement eux lieu rapidement. Le démon fut surpris par la manœuvre, il ne s’attendait pas à tant de résistance et encore moins à du sens tactique. Les ailes du V passèrent sans encombre car elles étaient hors de porté du golem. Ils lancèrent leurs flèches, une partie des projectiles fit mouche transperçant la chaire incandescente qui laissa échapper un liquide verdâtre et fumant.

Le golem mis un genou à terre mais écrasa sa massue sur les derniers soldats. Trois hommes perdirent la vie et le Maître de Cavalerie fut désarçonné. Il roula au sol, se releva d’un bon et contourna rapidement le titan qu’il transperça de son épée au tendon encore valide. La chose s’écroula de toute sa masse se tordant de douleur sans pouvoir se relever. La chaleur près du golem était intense, la cape de l’officier pris feu et il du s’en débarrasser. La sueur perlait sur son front mais il n’abandonna pas. N’écoutant que son courage, il se rua sur le géant et lui planta de toute ses force son épée dans le front. Un craquement sourd se fit entendre, la boite crânienne du mastodonte céda sous le choc et une bouillie infâme et visqueuse se répandit sur le sol.

Hors d’halène, le Maître de Cavalerie lâcha son arme devenue incandescente au contact du colosse. Alors qu’il allait se retourner pour fuir vers la ville, une lame traversa ses entrailles, il la vit saillir de son abdomène. Le sang ruissela le long de son corps et sa force l’abandonna. Il esquissa un mouvement de la tête et vie le visage immonde du démon qui semblait lui sourire dans un rictus hideux. Il tenta dans un effort désespéré de sortir sa dague pour l’emmener dans son trépas mais il était trop tard. Il s’effondra suspendu à la rapière de son vainqueur.

Le démon tourna la tête vers la ville, le silence était total. Il retira son arme du corps du héros et l’abattit brutalement sur la carcasse meurtri pour le décapiter. Il ramassa son trophée et vola aux avant poste de la légion noir. Alors face aux hommes protégés par les remparts, il lança la tête du défunt et dans un hurlement strident leur promis le même sort s’ils ne se rendaient pas.

Ainsi mourut le Maitre de Cavalerie, son sacrifice ne fut pas vain car huit hommes purent regagner la sécurité des remparts de la ville. Bilarr resta impassible, mais la fureur grondait en lui. C’est un ami proche qu’il perdait, il savait aussi que ce n’était que le début des hostilités et que le pire était à venir.