dimanche, juin 04, 2006

Le Chien Métamorphe

L’animal déambulait dans la ville riche de milles parfums, il avait volontairement pris l’apparence d’un petit chien inoffensif mais surtout capable de se faufiler partout. L’amulette pendait autour de son coup et le poids de l’objet ne lui rendait pas la vie facile. Son apparence ne lui permettait de se déplacer qu’à grande peine. Ses objectifs étaient simples, son maître avant de trépasser, lui avait clairement indiqué qu’il devait retrouver son créateur et lui remettre l’objet.

Cet ordre était gravé dans sa mémoire. Bien que d’une intelligence limitée, il avait un potentiel suffisant pour survire dans un environnement hostile. Il réussit à s’extirper de la ville sans encombres. Une fois à l’extérieur, il était plus à l’aise et moins vulnérable. Il repris donc une forme plus agressive : Celle d’un loup. Le transport de l’objet en devint plus aisé. Il devait toutefois retrouver la trace de son maître. Pour cela son flair infaillible lui serait d’une grande utilité.

Il mit trois jours à identifier la bonne piste. Dès qu’il la repéra, il fonça à en perdre haleine, ne prenant que le minimum de repos nécessaire et évitant tout contact avec les humains. Le loup volait littéralement, il approchait de sa meute. Il fonçait à travers bois quand une vive douleur le pris à la patte postérieure gauche et eut pour effet de le stopper net. Interloqué la bête se cabra, tenta de se dégager vainement. Elle était prise au piège sans possibilité d’évasion. La douleur et son affaiblissement soudain bloquaient ses capacités morphiques.

Il n’avait plus qu’à attendre une improbable délivrance tout en étant prêt à vendre chèrement sa peau. Le braconnier se présenta quelques heures plus tard. Avançant avec précaution, il vit que le piège avait porté ses fruits. Il s’approcha dans le noir et tata du bâton la prise. Elle était inerte. Il n’avait plus qu’à s’en saisir et à retourner vivement à sa ferme pour faire un bon repas. Cet excès de confiance lui fut fatal. Dès qu’il libéra l’animal du piège, celui-ci en un éclair lui sauta à la gorge. Les crocs se refermèrent sur la jugulaire. La pression terrible exercée par la mâchoire fit céder les cervicales dans un craquement sec. Le pauvre paysan expira dans l’instant sans même s’être rendu compte de ce qui lui arrivait.

Blessé, la bête ne pouvait résister longtemps. Elle ne pouvait pas se soigner mais elle savait que son temps était compté. Elle devait se dépêcher avant que ses forces ne l’abandonnent complètement. Elle était conditionnée par sa mission et sa propre vie n’entrait pas en ligne de compte dans ce schéma. Elle poursuivit sans relâche son objectif sentant que son but était à portée de main. Elle survécu deux jours. Au crépuscule, elle expira mais elle était tout près de son maître. Elle pouvait le sentir, elle était au seuil du campement. C’est la vigilance d’une sentinelle homme serpent alerté par un mouvement suspect qui permit au Loup d’Or de récupérer ce précieux bien.

Il sentit grâce à ses dons extra sensoriels que son adversaire n’avait pu être éliminée. Cependant, il avait en main son objet de pouvoir. Le seul artéfact qui lui permettrait de restaurer l’armée Trogonienne. Dans d’autres temps son père avait commandée cette redoutable armée d’elfes Cylliques. Elle avait grandement contribuée à d’importantes victoires. Aujourd’hui, elle était sous l’emprise d’un charme du JUSTE. Il avait condamnée cette armée à être changée en arbre. Elle constituait une importante part de la forêt de Trobb.

Pleinement satisfait de ce résultat, il ne lui restait plus qu’à organiser la conquête de Vériadan. Ce n’était plus qu’une question de jours. Sa légion avait progressé sans rencontrer de réelle résistance. Plus que quelques jours de marche et la ville serait à sa mercie. Il jubilait déjà de la victoire éclatante qu’il allait remporter. Il se réjouissait aussi de retrouver son vieil ami Difan. Ce n’est pas qu’il le porta dans son cœur, mais il savait qu’il pourrait lui apporter un appoint non négligeable pour la suite des évènements. Quelques morts vivants au sein de l’armée de l’enfer serait du plus bel effet.

L'approche

Le loup d’or était désormais en pleine possession de ses moyens. Il ordonna à l’armée qui bivouaquait depuis plusieurs jours de se mettre en branle. L’objectif était la ville de Veriadan ou reposait son ami Difan. La partie ne serait pas de tous repos mais il avait une confiance absolue en ses ressources. Que pouvait de faibles humains incompétents face à l’immensité de ses pouvoirs. L’armée des ténèbres se mit en route et commença sa politique de terre brûlées et de terreurs. Les premiers villages qu’elle croisa furent mis à feu et à sang sans rencontrer une véritable résistance. Après quelques jours d’atroces massacres de paysans, les bourgs que traversaient les troupes étaient tous déserts. Leurs mouvements étaient désormais connus, leur réputation semblait aussi les précéder.

Il fallut deux jours pour que la nouvelle de massacres perpétrés par une armée de monstres parvienne à la capitale du royaume septentrional. Les premières rumeurs furent accueillies par les citadins comme des affabulations et racontars absurdes. Mais l’afflux de réfugiés et les blessures béantes de certaines victimes convainquirent les autorités que quelque chose d’anormale se déroulait. Bien que ne prêtant aucune foi aux histoires de monstres, il semblait bien que s’était organisé un groupe de pillards aux objectifs obscurs. Le roi ne pouvait continuer d’ignorer ces évènements, face à l’inquiétude grandissante, il réunit son conseil pour déterminer les mesures qu’il y avait lieu de prendre en pareille circonstance.

Le royaume du nord était paisible mais sa culture guerrière était plus marquée que dans toutes les autres régions. L’esprit guerrier s’était émoussé mais une puissante armée avait toujours été entretenue pour permettre à tous les croyants de différentes confessions de s’adonner à leurs prières en toute quiétude. La paix religieuse ne s’était pas faite dans la sérénité et de nombreuses sectes extrémistes avaient tenté de déstabiliser la concorde au fil du temps. Les chevaliers de la croix comme on les nommait avaient du, plusieurs fois au cours des derniers siècles, recourir à la force. Certains heurts s’étaient terminés dans un bain de sang mais c’était toujours à contre cœur que le souverain s’était résigné à en arrivé là.

Les chevaliers de la croix constituaient un groupe puissant. Le souverain était issu de leur rang et assumer leur commandement. Ils étaient athée ce qui leur assuré impartialité et reconnaissance auprès des croyants. Leur signe distinctif était une armure portant une croix celte dorée sur le torse. Le temps et le déclin des vocations militaires avaient réduit leur nombre à environ 300 éléments divisés en trois corps. Le gros des troupes était constitué de fantassin, puis venait une cinquantaine de cavalier et autant d’archers. L’usage des machines de guerre s’était totalement perdu. Elle n’étaient connu que par l’intermédiaire des livres qui en traitaient et uniquement des officiers qui avaient accès à ce type d’archives.

Ces hommes vivaient dans des basiliques guerrières, il s’agissait de lieux saints fortifiés. Avec des effectifs qui s’étaient réduits, le seul endroit qui les accueillait encore était la basilique de Veriadan. Cette basilique était un croisement de lieu saint avec un ouvrage guerrier, on y trouvait des vitraux inaccessibles avec des meurtrières contiguës. Il y avait autour du bâtiment des enceintes fortifiées avec des tours de guets. Les religieux cohabitaient avec cette armée à laquelle il apportait assistance en cas de danger.

Tous les pèlerins en temps de paix avaient accès à ces lieux saint et il n’était pas rare de rencontrer ces hommes en arme. Ils étaient les seuls à pouvoir pénétrer dans une enceinte consacrée avec leur équipement de combat. Au coeur de cet ordre de chevaliers coexistaient trois grades distinctifs. La croix dorée était le symbole de tous les fantassins. La croix rouge était réservée à l’élite d’entre eux (une petite centaine d’hommes tout au plus). Enfin la croix blanche réservée aux primats, sorte d’officiers auxquels tout un chacun était tenu d’obéir. Leur aura dépassait le simple cadre des chevaliers de la croix. Ils étaient révérés par l’ensemble des citoyens du royaume et leur porter assistance en toute circonstance était un devoir sacré.

Le conseil du roi était constitué de prélats des religions principales à travers les royaumes unifiés et des principaux officiers de l’ordre de la croix. Tous étaient réunis au sein de la Basilique Saint Réual et l’inquiétude était palpable. Des groupes s’étaient formés et les chuchotis emplissaient la pièce. C’est dans cette atmosphère tendue que le roi fit son apparition. Il était grand, jeune et fier. Il avait un air espiègle mais on sentait une grande force intérieure et beaucoup de sang froid. Bien que jovial de nature et bon vivant, il avait un air grave face aux circonstances qui avaient provoquées cette réunion. Dès qu’il pénétra dans la pièce le silence se fit et il invita tous les participants à prendre place autour de la table.

La préséance imposait de laisser la parole au représentant de la principale religion. Celui-ci exprima immédiatement de vives inquiétudes. Il souhaitait mettre sur pied rapidement un groupe armé afin de retrouver et châtier les assaillants qui avaient osé infliger une telle misère au genre humain. Il fut rapidement contré par d’autres qui considéraient que les dires n’étaient que billevesées et qu’il n’y avait aucune mesure à prendre. Les conflits entre paysans n’étaient pas rares et la violence était une constante dans ce type d’affaire. Les heures passaient et personne n’arrivait à s’accorder sur les mesures qu’il y avait lieu de prendre.

C’est alors que le roi fit taire l’assemblée pour exprimer son opinion. Il en avait suffisamment entendu pour synthétiser les informations qui lui étaient rapportées. Son prestige lui assurait une influence considérable sur l’ensemble du conseil. Il était un bon roi doublé d’un habile négociateur au puissant charisme et toutes les décisions qu’il avait prises à ce jour s’étaient révélées pertinentes. Ainsi, il trancha. Il décida d’armer une troupe de soldats qui servirait d’éclaireur. Un détachement de chevaliers de la croix d’une quinzaine d’homme aurait comme mission de rassembler des preuves pour étayer les divers témoignages recueillis. S’ils en avaient l’opportunité, il aurait la possibilité de mettre fin à la menace. Il avait une semaine pour revenir et faire un rapport complet d’activité.

La décision était sage, juste et prudente. Le roi n’avait pas pris position entre les différentes factions. Il avait sollicité un complément d’enquête avant de prendre une quelconque mesure. Cela ne pouvait que satisfaire l’ensemble des participants du plus sceptique au plus catastrophiste. Comme personne n’y voyait d’inconvénients, la motion fut soumise au vote et fut entérinée à l’unanimité. Une bonne chose avait été accomplie mais dans son for intérieur Bilarr était inquiet. Jamais il n’avait vu de telles mutilations sur des corps. Et si les récits des paysans étaient vrais, il fallait s’attendre au pire.